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LibyeR�publique libyenne |
Capitale:
Tripoli Population: 6,1 millions (2008) Langue officielle: arabe Groupe majoritaire: arabe libyen (67,5 %) Groupes minoritaires: arabe �gyptien (9,7 %), arabe marocain (4,4 %), arabe soudanais (4,4 %), berb�re nafusi (3,5 %), arabe tunisien (3,1 %), arabe palestinien (1 %), penjabi (1 %), arabe hassaniyya (0,7 %), domari ((0,6 %), italien (0,4 %), serbe (0,4 %), cinghalais (0,2 %), berb�re tamahaq (0,2 %), cor�en (0,1 %), anglais (0,1 %), filipino (0,1 %),berb�re ghadam�s (0,1 %), zaghawa (0,1 %), fran�ais (0,1 %), grec (0,1 %), berb�re sawknah (0,1 %), maltais (0,1 %), etc. Langues coloniales: italien, fran�ais, anglais Syst�me politique: gouvernement provisoire Articles constitutionnels (langue): article 2 de la Constitution du 11 d�cembre 1969, modifi�e le 2 mars 1977 Lois linguistiques: circulaires, d�crets et diverses lois (inaccessibles) |
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La Libye
(voir Maghreb)
est un pays d�Afrique
du Nord, ouvert sur la
mer M�diterran�e. Elle partage partage ses fronti�res avec six pays. Les uns
font partie des pays arabes : l��gypte
� l�est, l�Alg�rie
� l�ouest et la
Tunisie au nord-ouest. Les autres appartiennent d�j� � l�Afrique
noire : le
Soudan au sud-est, le
Tchad et le
Niger au sud. La Libye,
le troisi�me plus grand pays d�Afrique apr�s
l�Alg�rie et le Soudan, poss�de une superficie de 1 759 540 km�,
soit trois trois la France.
Le pays compte deux �lots au climat m�diterran�en au nord, la Tripolitaine � l�ouest, la Cyr�na�que � l�est. Le d�sert occupe 90 % du territoire, et comporte trois r�gions : le d�sert de Syrte au nord, le d�sert libyque (occupant une partie de la Libye et de l��gypte), le Fezzan (quart sud-ouest de la Libye saharienne). La fa�ade m�diterran�enne de 1770 km de long concentre l�essentiel de la population (90 %). |
Le nom de Libye proviendrait
de la tribu des Libou, qui occupait la fa�ade m�diterran�enne durant le premier
mill�naire avant notre �re. Sous l�Empire romain, le terme finit par d�signer
l�ensemble de l�Afrique � l�Ouest du Nil. En 1911, les Italiens ont repris ce
nom pour l�appliquer � la r�gion tripolitaine, puis � l�ensemble du pays.2 Donn�es d�molinguistiquesLa population de la Libye �tait estim�e � 6,1 millions d'habitants en 2008. Les travailleurs �trangers et leurs familles repr�sentent pr�s de 20 % de la population totale et 50 % de la population active. Ils viennent principalement d��gypte, du Soudan et du Sahel (Niger, Tchad, Nigeria, etc.). Les Libyens sont, pour la plupart, d�origine berb�re. Ils ont �t� arabis�s assez t�t avec l�expansion de l�islam d�est en ouest, port�e par les tribus arabes d�s le VIIIe si�cle. L�islam est religion d��tat et, depuis 1994, la Charia, loi islamique, s�applique en mati�re de droit. La quasi-totalit� de la population libyenne est musulmane sunnite. L�islam libyen demeure organis� autour de la confr�rie religieuse senoussi. L�arabe est la langue officielle, mais le berb�re est toujours parl�, notamment dans les oasis et dans les montagnes de Tripolitaine et de Cyr�na�que. |
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2.1 Les ethnies
On distingue les Arabes, les Berb�res, les Occidentaux, les Asiatiques, les Nilo-Sahariens et les Austron�siens. Les Arabes de toutes origines (�gyptiens, Soudanais, Tunisiens, Palestiniens, B�douins, Maltais, etc.) forment la majorit� de la population avec 90 % des Libyens. Suivent les Berb�res (4,7 %), les Occidentaux (env. 1 %), les Indo-Pakistanais et autres Asiatiques (env. 1 %), les Nilo-Sahariens (moins de1 %) et les Philippins (moins de 1 %). La plupart des Arabes d'origine libyenne sont de descendance mixte, c'est-�-dire arabo-berb�re. Les Berb�res habitent de petits villages � l'ouest de la Libye; ils ont tendance � s�identifier � leur tribu ou � leur village plut�t qu�� la nation libyenne.
Les B�douins, dont les Touaregs, habitent le sud du pays; ce sont g�n�ralement des nomades qui d�placent leur b�tail d�un endroit � l�autre et qui vivent dans des tentes.L'afflux de travailleurs �trangers a contribu� � l'accroissement de la population. Ces immigr�s viennent principalement des pays arabes, notamment d'�gypte, du Soudan, de Tunisie et de Palestine. Mais la Libye fait de plus en plus appel � une main-d'�uvre d'origine asiatique, essentiellement indienne et pakistanaise, cor�enne et philippine, puis occidentale (Britanniques, Italiens, Fran�ais, Grecs, Bulgares). Retenons que la seule minorit� linguistique indig�ne d'importance est la communaut� berb�re.
Ethnie | Langue maternelle | Affiliation linguistique | Population | % | ||
Arabes libyens | arabe libyen | chamito-s�mitique | 1 702 400 | 33,2 % | ||
Arabes cyr�na�ques | arabe libyen | chamito-s�mitique | 1 400 000 | 27,3 % | ||
Arabes �gyptiens | arabe �gyptien | chamito-s�mitique | 500 000 | 9,7 % | ||
Berb�res arabis�s | arabe marocain | chamito-s�mitique | 228 000 | 4,4 % | ||
Arabes soudanais | arabe soudanais | chamito-s�mitique | 227 488 | 4,4 % | ||
B�douins du Fezzan | arabe libyen | chamito-s�mitique | 168 000 | 3,2 % | ||
Arabes tunisiens | arabe tunisien | chamito-s�mitique | 159 000 | 3,1 % | ||
Berb�res nefusa | nafusi | chamito-s�mitique (berb�re) | 141 000 | 2,7 % | ||
Arabes noirs | arabe taizzi-adeni | chamito-s�mitique | 98 000 | 1,9 % | ||
Arabes palestiniens | arabe levantin du Nord | chamito-s�mitique | 54 000 | 1,0 % | ||
Panjabi de l'Ouest | penjabi de l'Ouest | langue indo-iranienne | 54 000 | 1,0 % | ||
Zuara | nafusi | chamito-s�mitique (berb�re) | 43 000 | 0,8 % | ||
Berb�res jalo | arabe hassaniyya | chamito-s�mitique | 40 233 | 0,7 % | ||
B�douins du Sirte | arabe libyen | chamito-s�mitique | 33 538 | 0,6 % | ||
Domari (Tsiganes) | domari | langue indo-iranienne | 33 000 | 0,6 % | ||
B�douins de Riyah | arabe libyen | chamito-s�mitique | 28 000 | 0,5 % | ||
Berb�res de Jofra | arabe libyen | chamito-s�mitique | 26 649 | 0,5 % | ||
Italiens | italien | langue romane | 22 530 | 0,4 % | ||
B�douins kufra | arabe libyen | chamito-s�mitique | 22 000 | 0,4 % | ||
Serbes | serbe | langue slave | 21 510 | 0,4 % | ||
Cinghalais | cinghalais | langue indo-iranienne | 12 240 | 0,2 % | ||
Tamachek | tamahaq | chamito-s�mitique (berb�re) | 17 000 | 0,2 % | ||
Cor�ens | cor�en | langue cor�enne | 11 520 | 0,2 % | ||
Britanniques | anglais | langue germanique | 10 200 | 0,1 % | ||
Philippins | filipino | langue austron�sienne | 10 200 | 0,1 % | ||
Ghadam�s | ghadam�s | chamito-s�mitique (berb�re) | 10 000 | 0,1 % | ||
Zaghawa | zaghawa | nilo-saharienne | 7 000 | 0,1 % | ||
Fran�ais | fran�ais | langue romane | 6 120 | 0,1 % | ||
Grecs | grec | langue grecque | 6 120 | 0,1 % | ||
Sawknah | sawknah | chamito-s�mitique (berb�re) | 5 600 | 0,1 % | ||
Maltais | maltais | chamito-s�mitique | 5 400 | 0,1 % | ||
B�douins de Sanusi | arabe libyen | chamito-s�mitique | 5 000 | 0,0 % | ||
Bulgares | bulgare | langue slave | 2 700 | 0,0 % | ||
Teda | tedaga | nilo-saharienne | 2 000 | 0,0 % | ||
Wadshili | awjilah | chamito-s�mitique (berb�re) | 2 000 | 0,0 % | ||
Chinois | chinois mandarin | sino-tib�taine | 1 730 | 0,0 % | ||
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Cependant, depuis la �r�volution libyenne� de 2011, de trois � quatre millions d'�trangers ont quitt� le pays sous la pression des �v�nements: 1,5 � 2 millions d��gyptiens; un million d�Africains du Sahel, d�Afrique de l�Ouest et d�Afrique centrale; 600 000 Soudanais; plus de 200 000 Marocains et de 100 000 Tunisiens; quelque 60 000 Palestiniens et 10 000 Alg�riens, ainsi que de nombreux Turcs, Philippins, Sri Lankais et autres Asiatiques. Ces travailleurs assuraient de nombreuses fonctions �conomiques en Libye; une fois partis, beaucoup de chantiers, d'h�tels, de restaurants, de commerces, de stations-services, etc., ne fonctionnent plus, faute de personnel.
2.2 Les langues
Les langues sont relativement nombreuses en Libye, mais la plupart appartiennent � la chamito-s�mitique. Il s'agit d'abord de l'arabe libyen parl� par 65,7 % de la population. Soulignons toutefois que cet arabe libyen est fortement dialectalis� et se fragmente en plusieurs vari�t�s: l'arabe tripolitanien (capitale), l'arabe libyen du Sud, l'arabe libyen de l'Est, l'arabe libyen du Nord-Est, l'arabe bedawi, etc. Il existe aussi d'autres vari�t�s d'arabe telles que l'arabe taizzi-adeni et l'arabe hassaniyya. � cela il convient d'ajouter l'arabe provenant des travailleurs immigr�s : l'arabe marocain, l'arabe �gyptien, l'arabe tunisien, l'arabe soudanais, l'arabe palestinien et le maltais. � l'exception des Berb�res qui parlent l'arabe hassaniyya ou l'arabe libyen, la plupart d'entre eux font usage de langues berb�res telles que le nafusi, le tamahaq, le ghadam�s, le sawknah et l'awjilah. Certaines petites ethnies indig�nes parlent des langues nilo-sahariennes (zaghawa et tedaga). On compte aussi des langues indo-iraniennes (penjabi, domari, cinghalais), des langues occidentales indo-europ�ennes (anglais, italien, fran�ais, serbe, grec, bulgare, etc.), le cor�en et le chinois. L�anglais, le fran�ais et l�italien sont utilis�s dans le commerce, en raison de l'apport important des �trangers (�gyptiens, Soudanais, Tunisiens, Palestiniens, Indo-Pakistanais, Britanniques, etc.). Toutefois, la langue officielle est l'arabe classique. �videmment, l'arabe classique n'est la langue maternelle d'aucun locuteur en Libye.
Dans son rapport
CERD/C/431/Add.5 pr�sent� aux Nations unies au Comit� pour l'�limination de la discrimination raciale, la Libye d�clarait: �Les Libyens, qui sont tous de m�me origine raciale, professent l�islam et parlent l�arabe.� Or, les Libyens ne professent pas tous l'islam et ne parlent pas tous l'arabe. Dans le m�me rapport, on lit ce qui suit:Il n�existe aucune communaut� religieuse ou ethnique d�finie par sa religion, sa race, sa langue, son sexe, sa couleur de peau ou ses affiliations politiques, ces �l�ments �tant essentiels pour l�apparition du ph�nom�ne de discrimination raciale. Le fait que tous les citoyens libyens aient la m�me origine, la m�me religion et la m�me langue a sans aucun doute contribu� de mani�re d�terminante � l�absence de discrimination raciale dans le pays. |
Parmi ceux qui ne sont pas arabophones, il faut mentionner les Berb�res non arabis�s. Ils parlent une vari�t� de berb�re, soit le nafusi, le tamahaq (amazigh), le ghadam�s, le sawknah ou l'awjilah. Sous le r�gime du colonel Kadhafi, parler ou �crire en public, lire ou imprimer une langue berb�re, tout cela �tait tout simplement interdit par le leader libyen, toujours rest� soup�onneux � l'�gard de ce peuple pr�sent dans le pays avant la conqu�te arabe du VIIe si�cle et connu pour sa r�sistance militaire � l'occupation italienne au d�but du XXe si�cle.
Il semble que la Libye devrait son nom � la tribu des Libou de la r�gion de la Cyr�na�que. Avec les Mahouach, les Libou auraient attaqu� l��gypte pharaonique � partir du XIIe si�cle avant notre �re. Certains de ces Libyens seraient demeur�s en �gypte et seraient devenus mercenaires � la solde des pharaons, notamment la XXIe dynastie. Quant � l'historien grec H�rodote, il mentionne que le no deux dynasties suivantes, � partir de 945 avant notre �re, furent libyennes. On trouve le nom de Libya (Libye) chez les historiens grecs, qui servait � d�signer tout le nord du continent africain, sauf l��gypte.
3.1 Ph�niciens, Grecs et Romains
� partir du VIIIe si�cle avant notre �re, les Ph�niciens fond�rent des comptoirs
commerciaux sur la c�te de la Tripolitaine (� l'ouest). Au si�cle suivant, la
r�gion de la Cyr�na�que (� l�est), �tait colonis�e par les Grecs. Finalement, au
cours du Ier
si�cle avant notre �re, les trois
r�gions qui forment l�actuelle Libye � la Tripolitaine, la Cyr�na�que et le Fezzan �
pass�rent sous domination romaine. La Libye, alors riche et fertile, devient l�un
des greniers de l�Empire romain. Le pays fut rapidement latinis�.
Quelques si�cles plus tard, le pays amor�a un long d�clin apr�s l�envahissement des r�gions c�ti�res par les
Vandales en 455, puis celles-ci furent reconquises par les Byzantins � partir de
533.
3.2 Les Arabes et les Normands
AU VIIe si�cle, plus
pr�cis�ment en 641, les Arabes conquirent d'abord la Cyr�na�que, puis
la Tripolitaine. Ces r�gions furent progressivement islamis�es et arabis�es, sauf les
populations berb�res qui s'islamis�rent sans s'arabiser. Les conqu�rants musulmans ne
parvinrent jusqu�au d�sert du Fezzan qu�en 666. Par la suite, cette r�gion connut jusqu�au
XIXe si�cle
une histoire distincte. � partir du XIIIe si�cle, elle passa sous suzerainet�
de l�empire tchadien de Kanem-Bornou. Au XVIe si�cle, une dynastie ch�rifienne y
fut fond�e par des Marocains.
En Cyr�na�que et en Tripolitaine, les Berb�res r�sist�rent aux
Arabes en se ralliant au kharijisme. Il s'agissait d'un mouvement rigoriste dissident de
l�islam. Au XIIe si�cle,
ces r�gions furent en partie conquises par les Normands, qui
les abandonn�rent bient�t aux Almohades.
3.3 Les Ottomans et les Italiens
� partir de 1551, la Cyr�na�que et la Tripolitaine chang�rent d'all�geance et
pass�rent sous la domination ottomane (voir
la carte).
La ville de Tripoli ainsi que les ports c�tiers servirent de base pour les corsaires turcs.
� plusieurs reprises, les Occidentaux tent�rent de freiner les ardeurs des
Ottomans install�s en Libye. Au XXe
si�cle, la confr�rie des senoussis (du nom du fondateur al-Sanusi), qui
contr�lait la r�gion de la Cyr�na�que depuis un demi-si�cle, dirig�rent la
r�sistance contre les
Italiens qui avaient entrepris la conqu�te de la Libye en 1911. Finalement, l�Empire ottoman
dut renoncer � ses droits sur la Libye en 1912.
Cependant, la conqu�te italienne ne se termina qu'en
1932 dans le Fezzan. Les Italiens fusionna les trois r�gions historiques (Tripolitaine, Cyr�na�que et
Fezzan) en une
colonie libyenne, laquelle devient une �province italienne� en 1939. La domination
italienne se r�v�la d�sastreuse pour les Libyens : entre 1911 et 1945, les
Italiens extermin�rent ou forc�rent � l'exil la moiti� de la population locale. Durant ce
temps, ils impos�rent leur langue dans l'administration du pays. Sous le r�gime
colonial, l'italien �tait la langue d'instruction dans les �coles, mais
seulement un faible nombre d'enfants musulmans a pu fr�quenter ces
�tablissements.
3.4 Le royaume f�d�ral libyen
Apr�s la Seconde Guerre mondiale, la France et la
Grande-Bretagne se partag�rent le contr�le du pays. Des garnisons fran�aises
demeur�rent dans le Fezzan jusqu�en 1955. La Libye fut gr�ce � l'ONU la premi�re
colonie d'Afrique � acc�der � l'ind�pendance en 1951. Le pays se constitua en
une royaume f�d�ral form� des trois r�gions
historiques: la Tripolitaine, la Cyr�na�que et le Fezzan. L'Assembl�e nationale
d�signa l��mir Muhammad Idris as-Sanusi, chef de la confr�rie des senoussis,
comme roi qui prit le nom de Idris. Le 24 d�cembre 1951, le roi Idris Ier
proclama
l�ind�pendance du royaume de Libye. La Libye rejoignit la
Ligue arabe en 1953 et
les Nations unies en 1955.
Le nouvel �tat b�n�ficia de l�aide �conomique et technique de la
Grande-Bretagne, de la France et des �tats-Unis, en contrepartie du maintien de bases
militaires dans le pays. De plus, l'influence de l'anglais et du fran�ais
commenc�rent � se faire sentir dans l'administration de la Libye. Toutefois, la d�couverte des gisements p�troliers, en
1958 et 1959, allait modifier la position libyenne et des n�gociations pour le
retrait des troupes �trang�res d�but�rent en 1964. La Libye �tablit des relations
diplomatiques avec l�URSS en 1956, mais elle repoussa les propositions d�aide
�conomique de la part des Sovi�tiques. Afin de r�pondre aux imp�ratifs li�s � la
production p�troli�re, le f�d�ralisme fut aboli en 1964.
Puis des tensions se firent rapidement ressentir dans le pays et un climat de
m�contentement croissant s'installa, alors que, en m�me temps, le panarabisme se
d�veloppait dans le monde arabe. La subordination croissante du pays aux
int�r�ts occidentaux provoqua des �meutes qui furent vite r�prim�es.
3.5 La R�volution et la R�publique
Le 1er septembre 1969 s�ouvrit une �re nouvelle dans l�histoire de la Libye,
lorsqu�un coup d'�tat militaire dirig� par le capitaine Mouammar Kadhafi, alors
�g� de 27 ans, renversa la royaut� � le roi Idriss �tait alors en cure thermale
en Gr�ce � et proclama la
R�publique arabe libyenne, sans
occasionner la moindre effusion de sang. Le gouvernement r�volutionnaire, dirig�
par Kadhafi, afficha d�embl�e un nationalisme intransigeant et exigea
l��vacuation imm�diate des bases anglo-am�ricaines. En 1970, Kadhafi expulsa les
membres de la
communaut� italienne demeur�e en Libye apr�s l�ind�pendance (1951); quelque 25 000
descendants de colons italiens furent forc�s de quitter au plus vite le
territoire.
Le r�gime calqua ses structures sur celles de l'�gypte nass�rienne. L�administration, l��ducation et le domaine culturel furent int�gralement arabis�s. La politique linguistique en fut une d'arabisation et de combat anti-italienne, anti-anglaise (am�ricaine) et anti-fran�aise. Une ordonnance fut publi�e en exigeant que tous les panneaux de signalisation, les plaques des rues, les enseignes des magasins, etc., devaient �tre r�dig�s uniquement en arabe. Cette politique d'arabisation atteignit son apog�e en 1973, lorsqu'un d�cret exigea que les passeports des individus cherchant � entrer au pays contiennent toutes les informations personnelles en arabe, une exigence qui fut respect�e scrupuleusement. En 1973, les soci�t�s p�troli�res furent toutes nationalis�es. Le nouveau dirigeant libyen affirma �galement sa d�termination � jouer un r�le plus important dans les affaires du Proche-Orient et de l�Afrique du Nord, et se posa en rassembleur du monde arabe et musulman.
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Kadhafi publia en 1976 son fameux Livre vert. Dans cet ouvrage, il faisait ressortir ses id�es concernant la d�mocratie, les probl�mes �conomiques et les bases sociales de �la troisi�me th�orie universelle�. Ce livre montrait son opposition � la �d�mocratie occidentale�, qu�il consid�rait comme une �dictature�. Il s�opposa par la violence � toute opposition interne comme � l�ext�rieur de son pays. Dans le Livre vert, Kadhafi s�opposait � l�enrichissement personnel, puisqu'une telle transformation ne peut se r�aliser qu�au d�triment d�autres personnes.En 1977, Kadhafi proclama la Jamahyria, un mot arabe pouvant se traduire par �r�publique des masses�. Il mit en place un syst�me de �d�mocratie directe� � travers les Comit�s populaires. Dans la pratique, le syst�me politique libyen demeura un couvert par lequel Kadhafi renfor�a son pouvoir personnel et imposa une certaine dictature. Le r�gime libyen se radicalisa. Toute opposition ou toute voix tentant d�exprimer des points de vue diff�rents de ceux dict�s par le r�gime de Kadhafi furent r�prim�es. En 1980, Kadhafi rompit avec l�al-Fatah, la branche arm�e de l�Organisation de lib�ration de la Palestine (OLP), dont il soutint, d�s lors, l�aile la plus radicale. D�autres mouvements nationalistes r�volutionnaires re�urent l�aide financi�re et logistique du r�gime de Kadhafi, au nom d�un anti-imp�rialisme qui �tait dirig� en premier lieu contre les �tats-Unis. |
3.6 L�isolement
La politique ext�rieure de la Libye bas�e sur le panarabisme, la condamnation
violente de �l'imp�rialisme occidental�, le soutien aux mouvements
ind�pendantistes � travers le monde et l'intervention dans les pays voisins ne
contribu�rent qu'� isoler la Libye de la communaut� internationale, car le
r�gime se fit accuser de venir en aide � des organisations terroristes
internationales. Mouammar Kadhafi devint le paria de la plan�te. Le pr�sident �gyptien,
Anouar el-Sadate, l'a trait� de �voisin fou�; le pr�sident des �tats-Unis,
Ronald Reagan, l'a qualifi� de �chien enrag�.
Dans ce contexte, les �tats-Unis men�rent en avril 1986 une attaque a�rienne sur la Libye, qui fit une centaine de victimes. Bien que les raids am�ricains provoqu�rent d�importants d�g�ts et firent de nombreuses victimes, ils ne suscit�rent que des protestations formelles de la part des pays arabes et de l�Union sovi�tique. Par ailleurs, la Libye fut de nouveau accus�e par les �tats-Unis, le Royaume-Uni et la France d��tre impliqu�e dans deux attentats a�riens contre des avions de ligne, l�un am�ricain qui explosa en vol en 1988, au-dessus de Lockerbie (en �cosse), l�autre fran�ais qui s��crasa dans le T�n�r� en 1989. En 1992, un embargo a�rien et militaire fut d�cid� par le Conseil de s�curit� des Nations unies, qui �largit ainsi l�embargo d�cr�t� unilat�ralement par les �tats-Unis en janvier 1986.
Au plan int�rieur, le colonel Kadhafi s'en prit aux Berb�res de son pays. Tous les militants et porte-parole berb�res furent arr�t�s, emprisonn�es ou liquid�s. En juin 1985, un jeune Berb�re, Ferhat Ammar Hleb, fut pendu sur la place publique dans sa ville natale (Zouara). Il avait �tudi� aux �tats-Unis et �tait reconnu pour ses positions favorables � la cause berb�re. Le r�gime libyen l�accusa d�avoir des contacts avec des opposants libyens aux �tats-Unis et le condamna � la pendaison. La langue berb�re fut interdite en public, les livres r�dig�s en berb�re furent br�l�s. Les militants berb�res, comme tous les opposants, furent poursuivis jusque dans l�exil o� ils se faisaient assassin�s par les agents des services secrets du r�gime libyen. Kadhafi interdit l'enseignement de toute langue �trang�re.
Au m�me moment, les portraits de Kadhafi couvraient tout le pays, sur les fa�ades des immeubles, dans les commerces et les h�tels, sur les panneaux publicitaires, etc. Il �tait possible d'admirer Mouammar Kadhafi � toutes les �poques de sa vie: en uniforme de jeune colonel putschiste, en tenue de v�n�rable chef africain, en sexag�naire � la chevelure noire, etc.
� la fin de la d�cennie de 1980, le r�gime de Kadhafi dut faire face � l�opposition des mouvements islamistes, dont le plus c�l�bre, les Fr�res musulmans. Afin de contrecarrer la mont�e de l�islamisme, le r�gime libyen adopta la Charia comme fondement du droit libyen, en 1994, tout en menant une s�v�re r�pression contre les Fr�res musulmans. Mouammar Kadhafi d�clara que la langue parl�e autoris�e au paradis est celle de l'islam, l'arabe coranique. Le colonel utilisa habilement la menace islamiste pour obtenir la coop�ration des autorit�s �gyptiennes et des pays arabo-musulmans, dont de nombreux ressortissants r�sidaient et travaillaient en Libye et �taient susceptibles d�en �tre expuls�s, comme des dizaines de milliers d'�gyptiens et de Soudanais l'ont �t� en 1995.
3.7 Les mesures d'assouplissement
Afin de rompre l'isolement de son pays, le colonel Kadhafi multiplia aussi les voyages dans les pays de
la zone sah�lienne (Niger, Nigeria, etc.), annon�a la reprise des investissements
libyens au Soudan et au Mali et renoua avec le Tchad. De plus, il
re�ut l�appui du pr�sident sud-africain, Nelson Mandela qui, en visite en
Libye, en octobre 1997, critiqua l�embargo des Nations unies et r�clama son
arr�t. En juin 1998, l�OUA d�cida de lever unilat�ralement l�embargo a�rien
impos� � la Libye.
En juin 2003, Mouammar Kadhafi, le �guide de la R�volution�, annon�a sa volont� de privatiser les entreprises qu�il avait lui-m�me nationalis�es en 1969, notamment celles qui g�raient le p�trole, principal revenu du pays. L�abolition des entreprises publiques r�pondait � une volont� afficher, d�assainir et de d�velopper l��conomie nationale. Kadhafi accusa la fonction publique libyenne d'�irresponsabilit� parce qu'ils auraient fait perdre des milliards de dollars par manque d�expertise, de moralit� et de patriotisme. Il estima qu�ils avaient fait courir � l��conomie de graves dangers qu'il fallait dor�navant �viter. En novembre 2004, Mouammar Kadhafi annon�a qu'il d�sirait voir la peine de mort abolie dans son pays. Il pr�cisa, devant une assembl�e de juges, d�avocats et d�universitaires, que cette d�cision n��tait en rien motiv�e par des pressions ext�rieures. Depuis un certain temps, des firmes am�ricaines et italiennes arrivaient � d�crocher des contrats avec la Libye, comme quoi elles avaient r�ussi � �plaire� au �guide de la R�volution�. Kadhafi poursuivit ses r�ves : il voulut f�d�rer les �tat du Sahara et et unir les pays arabes dans une grande union panarabe. Mais tous ses projets �chou�rent.
Le r�gime se pr�para � s'ouvrir au domaine tr�s lucratif du touristique. Il fallait aussi que le r�gime r�vise sa politique d'arabisation � tout crin et fasse des compromis avec la langue anglaise. Mouammar Kadhafi affirma alors que William Shakespeare �tait en fait un Arabe qui s'appelait
�Cheikh Spir�. Heureusement, il y a belle lurette que les Libyens se fichaient pas mal des �lucubrations de leur �guide� et ne se faisaient plus d'illusions. Le c�t� fantasque et impr�visible du �guide de la R�volution�, ses tirades � l'emporte-pi�ce lui ali�n�rent bien des gens, y compris ses voisins arabes. Beaucoup croyaient que si le �guide� �tait en qu�te d'un monde meilleur, c'�tait uniquement pour lui-m�me et son clan.Jusqu'alors, l'ouverture ext�rieure du r�gime ne s'�tait nullement accompagn�e de nouvelles libert�s pour les Libyens. Mouammar Kadhafi continuait d'affirmer que les Libyens jouissaient d'une �forme pure de d�mocratie�, alors que les syst�mes parlementaires occidentaux ne seraient, en r�alit�, que des �dictatures d�guis�es�.
Son fils, Se�f al-Islam Kadhafi, qui se voulait un r�formateur, �tait pressenti pour lui succ�der. Mouammar Kadhafi se d�pla�ait entour� d'un groupe de jeunes femmes arm�es � ses �amazones� � et aimait planter sa tente de B�douin l� o� il allait, m�me en visite officielle. On sait aujourd'hui que ces femmes �taient pour la plupart des esclaves sexuelles d�guis�es en soldates.Quant aux minorit�s, Kadhafi ne les portait pas en grande estime, notamment les Berb�res (Amazighs). Dans un �discours � la nation� prononc� le 1er mars 2007, � l�occasion de l�anniversaire de son coup d'�tat militaire, il avait affirm�:
Les tribus amazighes ont disparu depuis bien longtemps, depuis l��poque du Royaume de Numidie� Des tribus qu�on ne conna�t pas du tout� Il est possible qu�elles soient s�mitiques ou orientalistes venues ici, mais elles sont compl�tement disparues aujourd�hui et elles sont finies. O� sont les tribus machaoueches, ribou, libou, samou, tahnou? On ne peut m�me pas bien prononcer leurs noms. [...] C�est quoi les Amazighs, ce sont les descendants des Arabes, nous, nous n�avons pas de minorit� pour qu�on puisse en parler et leur donner des droits linguistiques et culturels, ce sont des Arabes� C�est un retour aux temps lointains. Parce que la langue amazigh n�a aucune valeur. Les Amazighs qui demandent ceci sont les pions du colonialisme, ces gens-l� re�oivent des salaires des services secrets �trangers |
Kadhafi estimait par ailleurs qu�il �tait �inutile de chercher (� utiliser) la langue de ces tribus qui ont disparu�; il critiquait l�emploi de la langue amazighe dans �certaines radios�, en allusion � des m�dias marocains. Ce type de discours t�moignait �loquemment de l'ignorance de Kadhafi en mati�re d'histoire, qui n'aimait gu�re les Berb�res, lesquels le lui rendaient bien. Sous le r�gime de Kadhafi, les minorit�s �taient ouvertement discrimin�es. Beaucoup furent t�moins d'entraves � la libert� de r�union et d�expression, � la d�tention de prisonniers dits politiques, de disparitions forc�es et de d�c�s en d�tention, d'absence de protection juridique et du recours � la peine de mort.
3.8 La contestation
Le �guide de la R�volution� libyen s'est tenu au pouvoir depuis 1969, ce qui en faisait le doyen des dictateurs du monde. Mais le r�gime du colonel Kadhafi apparut de plus en plus contest� par la population. � l'instar de la Tunisie et de l'�gypte, les Libyens manifest�rent contre le r�gime en f�vrier 2011. � la t�l�vision, Mouammar Kadhafi d�clara qu'il ne c�derait pas, ne d�missionnerait pas et ne tendrait pas l'oreille � ses opposants. Au besoin, il n'h�siterait pas � employer la force et mena�a ses opposants d'une riposte sanglante: �Rendez vos armes imm�diatement, sinon il y aura des boucheries.� Kadhafi n'a jamais eu de �poste officiel�, il �tait �le chef supr�me de la R�volution�. La chute apparaissait d'autant plus imminente que le �proph�te� n'�tait plus gu�re �cout� par son peuple. Le �guide supr�me� �tait pourtant pr�t � tout saccager avant de couler. Il d�clara m�me qu'il se battrait �jusqu'� la derni�re goutte de sang�, sans pr�ciser s'il s'agissait du sien ou de celui des autres. Depuis le d�but du soul�vement populaire, le colonel Kadhafi a trait� ses opposants de �rats� et de �blattes�, et se dirait pr�t � les massacrer, quitte � faire couler �des rivi�res de sang�. Comme en Tunisie, la Lybie �tait une kleptocratie, dans laquelle le r�gime � la famille du pr�sident � avait une participation directe dans tout ce qui valait la peine d'�tre achet�, vendu ou poss�d�. Le n�potisme �tait la r�gle.
- L'intervention militaire de l'OTAN
Kadhafi avait aussi les moyens de r�sister assez longtemps; il disposait de ressources financi�res consid�rables et d'une force militaire capable de tenir un long si�ge dans la ville de Tripoli. De plus, il n'avait pas besoin de trouver des pr�textes pour se justifier. Pour lui, la menace qui planait sur son pays �tait avant tout le fruit d'une �uvre de propagande de la part de l'Occident. Devant le fait que la Libye risquait d'�tre coup�e en deux, une r�publique rebelle � l'est, un gouvernement Kadhafi ailleurs, le �guide supr�me� n'a pas h�sit� � recourir � la force afin d'�liminer toute r�sistance. Mouammar Kadhafi avait promis une �rivi�re de sang�, il a tenu promesse: des milliers de Libyens ont perdu la vie au cours des mois qui ont suivi les frappes de l'OTAN. On sait qu'une coalition de quelques pays (�tats-Unis, France, Royaume-Uni, Italie, etc.) a d�cid� de stopper le �progression meurtri�re de Kadhafi� en bombardant les installations militaires libyennes. Malheureusement, certaines frappes de l�OTAN ont eu aussi des cons�quences dramatiques pour les populations civiles. En plus du choc psychologique et du traumatisme qu�elles ont subi, des familles enti�res ont d� quitter leur logement pour se r�fugier sous des tentes, dans des conditions de vie extr�mement pr�caires.
L�intervention militaire en Libye, sans oublier les tentatives plus ou moins
transparentes de la part des Occidentaux d�influencer les �r�volutions arabes�,
t�moigne de l'int�r�t des �tats-Unis d'exercer un contr�le sur la production
mondiale de p�trole, car la Libye dispose des plus grandes r�serves confirm�es
de tout le continent africain. Cependant, le v�ritable objectif de l�op�ration
militaire en Libye, baptis�e �Aube de l�Odyss�e�, n'est pas le p�trole ni la
vengeance contre Kadhafi, c'est surtout d'�liminer la p�n�tration chinoise sur
le continent noir o�
P�kin cherche � d�velopper son acc�s aux ressources �nerg�tiques. Renverser le
r�gime de Kadhafi signifiait pour Washington pousser les Chinois vers la sortie.
Pour P�kin, les investissements chinois colossaux sont en train de partir en
fum�e; l'intervention militaire de l'OTAN est donc per�ue comme un acte hostile
� son endroit.
- La chute du dictateur
M�me si le dictateur a fini par tomber, quarante-deux ans de tyrannie auront laiss� la Libye fractur�e et sans institutions civiles fortes. Depuis la mise � l'�cart de Kadhafi dans certaines r�gions, depuis que des villages berb�res ont �t� �lib�r�s�, leur culture explose. En effet, la radio, les journaux, les associations, les mus�es, les chansons, les cours de langue amazighe, etc., sont sortis de leur torpeur. Sur les murs, apparaissent des dessins g�om�triques symbolisant les Berb�res dans la r�gion. En septembre 2011, l'autorit� de transition, le CNT, contr�lait la majeure partie du territoire libyen, mais les forces fid�les � la Jamahiriya arabe libyenne continuaient de tenir plusieurs bastions. Au moment o� le premier ministre libyen annon�ait que Mouammar Kadhafi pr�parerait une insurrection, le CNT r�v�lait de son c�t� que l'ancien dictateur aurait �t� victime d'un �change de tirs, apr�s avoir �t� captur� par les rebelles � Syrte, sa ville natale. Il aurait �t� atteint d'une balle � la t�te. En r�alit�, les circonstances de sa mort demeurent troubles. D'un bout � l'autre du pays, les masses sont descendues dans les rues pour c�l�brer la mort de �leur guide�. L'ex-dictateur a �t� inhum� dans le d�sert libyen dans un lieu maintenu secret.
- Le Conseil national de transition (CNT)
Il n'en demeure pas moins que la �r�volution libyenne� ne fut ni
d�mocratique ni spontan�e. Il s'agit au d�part d'un soul�vement arm� organis�
par la partie orientale du pays. De plus, ce mouvement fut largement soutenu par
des puissances �trang�res, dont les �tats-Unis, la France, l'Italie, le
Royaume-Uni, etc. Le Conseil national de transition, le CNT, qui a pris le
pouvoir � Tripoli, est une coalition d��l�ments disparates aux int�r�ts
divergents, dont l�unique point commun �tait leur opposition au r�gime Kadhafi.
Les v�ritables d�mocrates du nouveau r�gime ne constituent qu'une infime
minorit�, en conflit avec, d'une part, les tenants d�un retour de la monarchie,
d'autre part, les partisans d'un
islam radical. Or, l'histoire a maintes fois d�montr� que les �d�fenseurs de la
libert� sortaient rarement gagnants d'une strat�gie mettant en sc�ne des forces
aux int�r�ts divergents. Souvent, le r�gime dictatorial est remplac� par un
autre encore plus radical, tout aussi peu d�mocratique, voire anti-occidental.
Les nouveaux ma�tres du pays ont �t� clairs: toute loi qui ne respecterait pas la Charia, la loi islamique, devra �tre abolie. Kadhafi avait aboli la polygamie; les femmes en Libye n'�taient pas tenues de se voiler et avaient un acc�s �gal � l'instruction et � divers r�les dans la sph�re publique. Assisterons-nous � un retour de la polygamie, de la r�pudiation arbitraire de l'�pouse, de l'autorit� absolue du p�re sur le mariage de ses filles, et des r�gles concernant l'h�ritage? Les femmes risquent d'y perdre beaucoup. Malgr� la menace r�elle de l'extr�misme religieux, les Libyens semblent demeurer confiants dans l'avenir. Toutefois, d�s novembre 2011, les Berb�res d�non�aient leur marginalisation dans le nouveau gouvernement parce qu'ils se sentaient exclus des minist�res importants. Leur repr�sentativit� dans le gouvernement ne correspondrait pas � leur pr�sence ni � leur contribution � la �r�volution�. Les Berb�res exigent une plus grande reconnaissance de leur culture et de leur langue au sein de la nouvelle Libye.
- Un pays � reconstruire
Si l'heure de la lib�ration a sonn�, il reste encore un pays � reconstruire. Un nouveau chapitre s'ouvre dans l'histoire de la Libye, teint� d'espoirs et d'incertitudes. Il ne sera pas facile de construire des institutions politiques dans le vide absolu laiss� par le r�gime de Kadhafi. De fait, les rebelles ont pris les armes pour renverser une dictature toute-puissante. Puis ils n'ont jamais d�pos� les armes. Les Nations unies consid�rent les miliciens qui imposent aujourd'hui leurs lois comme la plus grande menace � la s�curit� du pays. De h�ros lib�rateurs, ils sont devenus les plus craints et les plus d�test�s de la nouvelle Libye.
En proie aux tensions entre brigades rivales, la Libye a sombr� dans le chaos. Elle est aujourd'hui �cartel�e entre deux gouvernements: l'un si�ge � Tobrouk, l�autre � Tripoli. �chappant � tout contr�le, le pays est livr� � tous les trafics : p�trole, armes, migrants, etc. L��chec du �printemps� libyen s�explique par le fait que ce pays avait connu quarante ans de dictature dans une soci�t� au caract�re clanique. Au lendemain de la chute de Kadhafi, les Libyens ont d� faire du �bricolage�, car ils n�avaient jamais particip� � un processus de gestion. C'est alors que les organisations radicales proches du groupe �tat islamique ont rempli le vide. Si la dictature est disparue, les Libyens ont recouvr� la libert� d�expression, mais ils ont maintenant peur d��tre assassin�s. Leur avenir d�pend maintenant du sort de l'accord conclu le 17 d�cembre 2015 au Maroc. Selon l�accord, les deux parlements rivaux devraient se fondre en un seul, c'est-�-dire en une Chambre des repr�sentants et en un Conseil d��tat, en plus d�un m�me pouvoir ex�cutif coll�gial. Mais si les leaders des deux parlements continuent de rejeter l�accord, le risque de voir na�tre une troisi�me autorit� libyenne, en plus des deux Parlements rivaux, n�est pas totalement exclu.
Les deux factions libyennes ont cherch� une solution dans la constitution d�un gouvernement pouvant les r�concilier. Malheureusement, les factions en ont cr�� trois. Deux de ces gouvernements se revendiquent d�une l�gitimit� politique et territoriale � ils sont install�s dans l�est et l�ouest du pays � , et le troisi�me, fruit d�un accord mal ficel� entre les deux premiers, n�existe que sur papier. De plus, les n�gociations visant � rapprocher les diff�rents camps et supervis�es par l�ONU sont laborieuses et enlis�es dans des querelles de repr�sentativit� et de proc�dures. En attendant, l��tat islamique �tablit des bases discr�tes et exploite le ressentiment d�une partie de la population pour conclure des alliances avec des groupes et des tribus en rupture avec les deux gouvernements �tablis � Tripoli et � Tobrouk. Pour les Occidentaux, l�ouverture de ce troisi�me front si proche des rivages europ�ens provoque une tr�s forte inqui�tude.
Les Occidentaux portent une lourde responsabilit� dans la situation actuelle. Ce sont eux qui, en 2011, ont lanc� une attaque a�rienne dans le but de d�loger le r�gime Kadhafi. Ils ont bien tent� d�accompagner les factions libyennes � travers un processus de dialogue, mais sans r�sultat concret pour l�instant. Pendant ce temps, l�instabilit� en Libye menace non seulement l�Afrique du Nord, mais aussi l�Europe, qui n�est qu�� 300 kilom�tres de l�, et fait face � un afflux de migrants sans pr�c�dent en provenance des c�tes libyennes. En 2016, l��tat libyen est inexistant et la s�curit� n�est plus assur�e sur cet immense territoire, ce qui ouvre la porte � l�enracinement de groupes criminels ou extr�mistes. On craint une nouvelle Somalie aux portes de l�Europe.
La politique linguistique de l'�tat libyen est r�sum�e � l'article 2 de la Constitution du 11 d�cembre 1969, modifi�e au 2 mars 1977, une constitution en principe suspendue depuis la chute de Kadhafi. Cet article se lit comme suit:
Article 2 La religion de l'�tat est l'islam et l'arabe sa langue officielle. L'�tat prot�ge la libert� de religion en accord avec les coutumes �tablies. |
Autrement dit, c'est une politique d'arabisation. Il reste � voir comment elle se concr�tise. Auparavant, citons cet extrait du rapport de la Libye pr�sent� aux Nations unies en 2003:
Comme nous l�avons vu, les citoyens de Libye ont la m�me origine, parlent la m�me langue et professent la m�me religion, l�islam. Par cons�quent, il n�existe aucune discrimination raciale en Libye. Le rejet par la soci�t� de ce ph�nom�ne vient de sa culture musulmane, fond�e sur le saint Coran, code social de la Libye. Le saint Coran contient de nombreux versets qui affirment que Dieu honore tous les peuples, sans distinction de langue, de religion ou de couleur. Il comprend �galement plusieurs versets qui exaltent les vertus de tol�rance, de respect, de gentillesse et de charit� envers les non‑musulmans. La soci�t� libyenne ne connaissant pas la discrimination raciale, il n�a pas sembl� n�cessaire d�adopter une l�gislation sp�cifique pour combattre ce ph�nom�ne. Toutefois, puisque la Convention a �t� ratifi�e par la Jamahiriya, elle fait maintenant partie int�grante du droit interne et a par cons�quent force obligatoire pour toutes les institutions nationales. En outre, la l�gislation interne contient de nombreuses dispositions interdisant tout type de propagande et d�organisations fond�es sur l�id�e d�une sup�riorit� d�une race ou d�un groupe de personnes d�une couleur ou d�une origine ethnique donn�e. |
Comme nous le verrons, ces dispositions ne s'appliquent pas aux Berb�res, l'une des deux communaut�s indig�nes du pays.
4.1 La langue de l'�tat
Ce n'est pas tr�s compliqu�. L'arabe classique est la langue officielle de l'�tat. La langue arabe jouit d�une grande puissance culturelle, car c'est aussi la langue de la religion qui est elle-m�me religion officielle. C'est l'unique langue obligatoire de l��cole publique et des tribunaux, de la radio et de la t�l�vision, ainsi que de l'Administration. Bref, l�arabe occupe tous les espaces de la vie sociale et officielle.
Les lois sont r�dig�es et promulgu�es sen arabe. Les d�bats parlementaires ont en arabe. L'Administration n'utilise que l'arabe classique dans les �crits, mais l'arabe libyen est courant dans la langue parl�e. En fait, c'est la diglossie qui fonctionne: tout le monde n'utilise oralement que l'arabe libyen, mais seul l'arabe classique pr�vaut � l'�crit. M�me dans les r�gions berb�res, seul l'arabe est admis. Il est interdit d�utiliser la langue berb�re dans de la part de l'Administration et de tout service public, car elle est non arabe. De toute fa�on, les fonctionnaires berb�rophones ont tous �t� affect�s dans des r�gions arabophones. L��tat libyen a aussi proc�d� � la mutation de fonctionnaires arabophones dans les r�gions berb�rophones afin de n'utiliser que la seule langue arabe. Dans ces conditions, il n'existe pas de service dans la langue des minorit�s, ni dans les bureaux gouvernementaux ni dans les cours de justice.
Comme l�illustre une circulaire du Bureau de liaison des Comit�s r�volutionnaires, dat�e du 18 juin 1995, il est pr�cis� qu�il est �interdit d�utiliser une langue autre que la langue arabe dans les diverses relations administratives locales�. La circulaire exige des Comit�s r�volutionnaires et des groupes de travail r�volutionnaires r�gionaux de surveiller la r�glementation (l'usage de la seule langue arabe) et de prendre les mesures appropri�es de sorte � obtenir des �r�sultats concrets�. Cette m�me circulaire pr�cise que les langues utilis�es dans �les relations ext�rieures ou avec les partenaires �trangers� ne sont pas touch�es. En fait, ce genre de mesures r�pressives ne sont destin�es qu�aux langues locales diff�rentes de la langue arabe, donc les langues berb�re
s et nilo-saharienne. Selon des t�moignages recueillis aupr�s de berb�rophones libyens en exil en Europe, tout un arsenal de directives, de circulaires, de lois, etc., officielles et officieuses, a pour objectif l�usage unique de la langue arabe et l'interdiction � implicite et explicite � de la langue berb�re. Cette politique n'a pas emp�ch� le gouvernement libyen de publier � l'occasion certains documents statistiques � usage interne dans un format bilingue anglais-arabe.Voici ce qu'on pouvait lire dans le fameux Livre vert du colonel Kadhafi sur la question des minorit�s:
Les minorit�s Qu'est-ce qu'une minorit� ? Quels sont ses droits et ses devoirs ? Comment le probl�me des minorit�s peut-il se r�soudre en partant des principes g�n�raux de la Troisi�me Th�orie universelle ? Il n'y a que deux types de minorit�s. Celles qui appartiennent � une nation qui leur fournit un cadre social, et celle qui, n'appartenant pas � une nation, forment elles-m�mes leur propre cadre. Ces derni�res accumulent les traditions historiques qui doivent permettre, � terme, par le jeu de l'appartenance et de la communaut� de destin, de former des nations. Il est clair que ces minorit�s ont des droits sociaux qui leur sont propres. Toute alt�ration de ces droits par une majorit� constitue une injustice. Les caract�ristiques sociales sont inh�rentes et ne peuvent �tre ni octroy�es, ni confisqu�es. Quant � leurs probl�mes politiques et �conomiques, ils ne peuvent �tre r�solus qu'au sein d'une soci�t� populaire dans laquelle les masses d�tiennent le pouvoir, la richesse et les armes. Consid�rer les minorit�s comme �tant politiquement et �conomiquement minoritaires rel�ve de la dictature et de l'injustice. |
Pour un linguiste, ce genre de texte correspond � ce qu'on pourrait appeler �la langue de bois�. Pas un mot sur la question linguistique! En r�alit�, le pays ne compte que deux populations indig�nes: les Arabes libyens et les Berb�res libyens. Le probl�me, c'est que le r�gime libyen pratiquait une politique d'arabisation forc�e aupr�s des populations berb�res. Si ces derni�res refusaient l�assimilation et tenaient � leur langue et � leur culture, elles se trouvaient n�cessairement menac�es par le r�gime. Non seulement l'�tat a affect� tous les fonctionnaires berb�rophones dans des r�gions arabophones, mais il a pratiquement supprim� tous les toponymes berb�res, fait dispara�tre les livres �crits en cette langue, a proc�d� au regroupement des populations berb�rophones au sein de municipalit�s arabo-berb�rophones afin de pouvoir mieux contr�ler les berb�rophones. Ensuite, des campagnes de propagande ont �t� organis�es pour inciter les Berb�res � des mariages mixtes avec les arabophones... dans le but de les arabiser. � une certaine p�riode, les communications t�l�phoniques en berb�re, une fois intercept�es, �taient syst�matiquement interrompues. Bien entendu, les pr�noms berb�res furent interdits par l�Administration libyenne. Les parents se sont vu imposer une liste de pr�noms arabes et ne pouvaient choisir pour les nouveaux n�s des pr�noms berb�res. Un autre exemple: le seul h�pital qui existait dans la r�gion de Zouara, l� o� r�sident la plupart des Berb�res, a �t� ferm� durant les ann�es quatre-vingt. Au moment o� ces ligne sont �crites, il n�existe aucun projet de r�ouverture ou de construction d�un h�pital dans cette r�gion dont les habitants restent priv�s de soins de sant� pourtant indispensables.
4.2 L'�ducation et la langue arabe
Des efforts importants ont �t� r�alis�s en Libye pour apprendre � lire et � �crire � une population largement analphab�te � la veille de l�ind�pendance. L�enseignement primaire a �t� rendu gratuit et obligatoire. En 2001, plus de 96,8 % de la population adulte �taient alphab�tis�s. Au d�but des ann�es quatre-vingt-dix, pr�s de 80 % des jeunes de 12 � 17 ans �taient scolaris�s. Que dit le Livre vert du �Guide de la R�volution�?
L'�ducation Le savoir, ou l'instruction, ne se limitent pas forc�ment � des programmes m�thodiques et � des mati�res scolaires que les jeunes sont oblig�s d'assimiler � partir de manuels et dans le cadre d'horaires pr�cis, assis derri�re des rang�es de pupitres. Ce genre d'�ducation, qui pr�vaut actuellement sur toute la terre, est une m�thode contraire � la libert�. L'enseignement obligatoire, dont se glorifient tous les pays lorsqu'ils peuvent l'imposer � leur jeunesse, n'est qu'une m�thode parmi d'autres pour r�primer la libert�. C'est l'oblit�ration arbitraire des dons de l'�tre humain et l'orientation autoritaire de ses choix. Il y a l� un acte de tyrannie nuisible � la libert�, car il prive l'homme de sa libert� de choix, de sa cr�ativit� et de son talent. Obliger les gens � s'instruire suivant un programme donn�, et leur imposer certaines mati�res est un acte dictatorial. L'�ducation obligatoire et standardis�e constitue en fait une entreprise d'abrutissement des masses. Tous les �tats, qui d�terminent officiellement les mati�res et les connaissances � enseigner et qui organisent ainsi l'�ducation, exercent une contrainte sur les citoyens. Toutes les m�thodes d'�ducation en vigueur dans le monde devraient �tre abolies par une r�volution culturelle mondiale visant � �manciper l'esprit humain de l'enseignement du fanatisme et de l'orientation autoritaire des go�ts, du jugement et de l'intelligence de l'�tre humain. Cela ne veut pas dire qu'il faille fermer les �coles ou, comme pourrait le supposer un lecteur superficiel, tourner le dos � l'�ducation. Cela veut dire, au contraire, que la soci�t� devrait fournir toutes sortes d'activit�s �ducatrices, permettant aux jeunes de choisir spontan�ment et librement les mati�res qu'ils souhaitent �tudier. Cela requiert des �coles en nombre suffisant pour toutes les disciplines. La raret� des �coles a pour effet de restreindre la libert� de choix, elle oblige � accepter ce qu'on vous propose et prive l'homme du droit naturel de choisir. Sont des soci�t�s r�actionnaires, favorisant l'ignorance et hostiles � la libert�, celles qui limitent le savoir et le monopolisent. Ainsi, les soci�t�s qui interdisent la connaissance de la religion telle qu'elle est, les soci�t�s qui monopolisent l'enseignement religieux ou celles qui dispensent un enseignement mensonger � propose de la religion, de la civilisation ou des coutumes d'autres peuples, les soci�t�s qui interdisent et monopolisent les connaissances technologiques, sont des soci�t�s r�actionnaires, favorisant l'ignorance et hostiles � la libert�. Le savoir est, pour tout �tre humain, un droit naturel dont personne, sous aucun pr�texte, ne peut le priver, sauf si l�int�ress� a commis un acte justifiant qu'on le prive de ce droit. L'ignorance dispara�tra lorsque toute chose sera pr�sent�e dans sa r�alit� et lorsque tout le savoir sera mis � la disposition de chacun, et de la mani�re qui lui convient le mieux. |
Les principes du Livre vert ont �t� mis en
�uvre, et les enfants ont �t� scolaris�s... en arabe. Dans la r�forme �ducative de 1974, on pouvait lire ces propos: �Il s�agit de former de futurs citoyens croyant en leur religion islamique et fiers de leur arabit�.� (Taoufik Monastiri dans Chronique sociale et culturelle, AAN 1974). En Libye, l��ducation est un droit et une obligation pour tous les citoyens. La scolarit� est obligatoire jusqu�� la fin du cycle �l�mentaire conform�ment � la loi no 95 de 1975 sur la scolarit� obligatoire et garantie par l��tat � travers la cr�ation d��coles et d�instituts. L��tat garantit �galement le droit � l�enseignement sup�rieur gratuit, conform�ment aux dispositions de la loi no 1 de 1992. Il se pr�occupe tout particuli�rement du bien‑�tre physique, mental et moral des jeunes, comme l�exige l�article 14 de la D�claration constitutionnelle. L�article 23 de la loi sur la promotion de la libert� dispose �galement que tout citoyen a droit � l��ducation, � l�information et au choix de connaissances appropri�es.Cela �tant dit, la seule langue admise dans les �coles publiques libyennes est l'arabe classique. En effet, du primaire jusqu'� l'universit�, la langue de l'enseignement dans les �tablissements publics est l'arabe classique. Par ailleurs, il existe des �coles priv�es dont les cours sont dispens�s massivement en anglais, en fran�ais ou en italien. Par exemple, l��cole de la Communaut� fran�aise de Tripoli scolarise des �l�ves d'environ 30 nationalit�s. Cela signifie que beaucoup de travailleurs �trangers pr�f�rent que leurs enfants re�oivent leur instruction en anglais, en fran�ais ou en italien plut�t qu'en arabe classique.
Toutefois, la langue berb�re ne jouit pas des bienfaits de l'enseignement libyen. Il est non seulement interdit d'enseigner le berb�re, mais �galement de traduire quoi que ce soit � l'intention des berb�rophones. Les manuels scolaires ignorent totalement le nom et le r�le des Berb�res dans l'histoire et la civilisation du pays; lorsqu'il s'agit d'�voquer les premiers habitants de la Libye (les Berb�res), on utilise l'expression connue �Arabes anciens�, ce qui �quivaut � nier toute berb�rit�. Pourtant, l
a Grande Charte verte des droits de l'homme � l'�re des masses, promulgu�e en 1988, �nonce de nombreux principes visant � consacrer et � sauvegarder la libert� des personnes et � garantir une vie d�cente � tous les membres de la soci�t�. Le principe 16 proclame ce qui suit:
Principe 16 La soci�t� de la Jamahiriya est une soci�t� de vertu et de valeurs �lev�es qui tient les principes et les valeurs humanitaires pour sacr�s et aspire � une soci�t� humaine sans hostilit�, sans guerre, sans exploitation et sans terrorisme, o� personne n'est plus ou moins important que les autres, o� toutes les nations, tous les peuples et toutes les nationalit�s ont le droit de vivre librement conform�ment � leurs choix et de d�finir leur avenir ainsi que d'�tablir leur identit� nationale et o� les minorit�s ont le droit � la protection de leurs membres et de leur patrimoine, sans qu'on puisse �touffer leurs aspirations l�gitimes ou recourir � la force pour les absorber dans une quelconque nationalit�. |
L'attitude du �Guide de la R�volution� � l'�gard des minorit�s berb�rophones a toujours �t� hostile: �La pr�tention � vouloir utiliser et maintenir le berb�re est une pr�tention r�actionnaire, inspir�e par le colonialisme.�
Malgr� le progr�s de l'arabisation des ann�es soixante-dix, l'anglais a occup� une place de plus en plus importante comme langue seconde dans le pays. Il a �t� enseign� d�s l'�cole primaire et, dans les universit�s, de nombreux cours de sciences, de techniques et de la m�decine ont �t� dispens�e en anglais, non en arabe. En 1986, le colonel Kadhafi a annonc� une nouvelle politique linguistique dont le but �tait d'�liminer l'enseignement de l'anglais en faveur du russe � tous les niveaux. Mais cette politique n'a jamais �t� appliqu�e; on a fait comprendre au �Guide la la R�volution� que l'anglais avait plus de chance dans l'imm�diat de conna�tre une expansion que le russe.
4.3 Les m�dias
L'organisation Reporters sans fronti�res a rappel� en octobre 2004 la situation extr�mement grave de la libert� de la presse en Libye. En voici un extrait:
La libert� des m�dias demeure quasiment inexistante, malgr� les efforts du r�gime libyen pour se doter d'une nouvelle image, plus valorisante en termes de respect des droits de l'homme, a d�clar� l'organisation. Les m�dias �crits ou audiovisuels sont depuis des ann�es inf�od�s au r�gime. Aucune critique du pr�sident libyen n'�tant tol�r�e, l'ensemble des journalistes pratiquent l'autocensure. Les reporters �trangers qui se rendent dans le pays - lorsqu'ils parviennent � obtenir des visas d�livr�s au compte-gouttes - sont �troitement surveill�s. |
Reporters sans fronti�res a aussi rappel� que le r�gime libyen d�tenait le triste record de la plus longue incarc�ration du monde pour un journaliste. Quant � la radio et la t�l�vision, ces deux secteurs restent un monopole absolu des pouvoirs publics, ainsi que le lieu privil�gi� de la propagande de l'�tat et de la d�sinformation.
Au point de vue linguistique, on peut affirmer que la plupart des journaux sont de langue arabe: Al-Jamahiria, Al-Fajr Al-Jadeed, Al-Shames, Azzahf Al-Akhdar, Akhbar Libya, Al-Aml, Al-Bait, Al-Fatah, etc. Certains journaux ont une version anglaise (Al Fajr Al Jadeed) ou bilingue anglais-arabe (Al-Mahatta). Seul le magazine Africa News Libya offre une version bilingue fran�ais-anglais. Il n'existe aucune presse dans une langue berb�re.
Les m�dias �lectroniques sont �galement massivement arabophones. Les stations radiophoniques tells que LJB Benghazi Radio (Benghazi), LJB Jamahiriya Radio (Tripoli), LJB Arabic (Misurata), LJB Arabic (Tripoli), LJB Arabic (Tobruk), LJB Tripoli (Tripoli), LJB Holy Koran (Gharghur), LJB Holy Koran (Tripoli), etc., pr�sentent leurs �missions en arabe. Toutefois, la Libyan Jamahariya Broadcasting Corporation, une entreprise d'�tat, pr�sente des �missions en anglais et en fran�ais.
L'�tat libyen pratique une politique linguistique ax�e sur l'arabisation forc�e en ignorant les langues des minorit�s nationales, notamment les langues berb�res et nilo-sahariennes. L�affirmation par la Libye qu'il n�existerait pas de minorit�s ethniques sur son territoire semble faire abstraction des Berb�res, des Touaregs, des Africains noirs, des peuples nilotiques, qui, selon certaines informations, seraient victimes d�actes de discrimination en raison de leur origine ethnique. La Libye impose ainsi unilat�ralement la langue arabe aux non-arabopones. On sait depuis longtemps que la r�pression, la torture et les ex�cutions sommaires sont des pratiques courantes dans ce pays. Toute opposition ou toute voix tentant d�exprimer des points de vue diff�rents de ceux dict�s par le r�gime de Kadhafi sont s�v�rement r�prim�es. Or, les berb�rophones semblent l�une des cibles de ce r�gime qui n�admet pas que l�arabit� de la Libye soit remise en cause.
Il faudrait que la politique linguistique de la Libye soit plus conciliante � l'�gard des non-arabophones indig�nes, particuli�rement les berb�rophones. On pourrait penser que l'�tat int�grerait l�enseignement de la langue berb�re dans les programmes des �coles publiques, l� o� les Berb�res sont plus massivement repr�sent�s. On pourrait permettre aux berb�rophones d�utiliser leur langue dans les diff�rents services gouvernementaux, que ce soit les tribunaux ou l'Administration. Enfin, l'�tat pourrait consacrer une partie de la programmation de ses m�dias, surtout � la radio et � la t�l�vision, � des �missions en la langue berb�re. Mais il ne pouvait pas en �tre autrement au pays du �Guide de la R�volution�, alors que la politique d'arabisation a entra�n� une politique d'assimilation. Il est � esp�rer que les nouveaux dirigeants libyens aient une perception plus �galitaire des droits des minorit�s, mais il n'est pas facile de tirer un trait sur quarante ans de dictature. Aujourd'hui, ce sont les miliciens arm�s qui contr�lent le pays.
Bibliographie
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